Faire collaborer des artistes, des artisans, des universitaires, des habitants, des collectivités dans un objectif de tourisme créatif : c’est l’Espace Muséal Immersif et Inspirant de Delphine Guglielmini. Un projet de musée participatif, lieu « de bon sens » qui s’intéresse aux gens et à « l’Histoire(s) ». Immersion.
Quand on lui demande à quoi ressemble son musée participatif, Delphine ferme les yeux. Elle inspire. « Idéalement, c’est un lieu près d’un chemin de rando ou d’une voie verte. Idéalement, c’est un bâtiment ancien avec une extension contemporaine pour faire vivre le passé et le présent. Idéalement, c’est un lieu avec des bureaux partagés. Idéalement, c’est un projet avec des espaces verts qui accueillent des marchés artisanaux, des food trucks, des animations en soirée. Idéalement, c’est un lieu évolutif, intérieur et extérieur. C’est un lieu vivant ! ». Le projet de Delphine s’appelle EMII : Espace Muséal Immersif et Inspirant. « Pour s’enrichir d’histoires. L’histoire avec un grand H et un petit s. L’objectif est de créer un lieu mêlant l’histoire et la créativité d’artistes locaux en y intégrant la parole des habitants et des notions scientifiques ».
un musée, quatre parties. Partie 1 : le visiteur traversera l’Histoire en cheminant à travers quinze ambiances différentes, l’entraînant dans un voyage depuis -35000 ans jusqu’à l’époque contemporaine. « Une visite ludique avec des costumes-tabliers à disposition pour qu’ils puissent se mettre en scène et se photographier ». Partie 2 : le cabinet de curiosités et de légendes personnelles. « Je réalise actuellement des recueils d’expériences de vies qui nourriront cet espace. Seront mis en valeur ici des objets, les histoires qui les entourent, la sensibilité des gens pour mettre en lumière des petites choses et inviter le visiteur à partager son expérience ». La troisième partie est une fabrique à souvenirs : « avec des ateliers collectifs participatifs où pourront se retrouver des habitants et des touristes. Ils seront animés par des professionnels : artistes ou artisans locaux. Nous pourrons, par exemple, créer des ouvrages collectifs démesurés qui seront l’occasion d’échanges, autour d’un métier et entre les générations ». Comme dans tous les musées, celui de Delphine disposera d’une boutique. Partie 4. « Je la souhaite spécialisée dans le patrimoine avec de l’artisanat, du design, des kits de réalisation DIY, une librairie, des cartes postales... Les propositions de cette boutique seront, au maximum, des créations locales ».
Actrice de mon territoire. L’idée de tourisme créatif trotte depuis un moment dans la tête de l’ancienne architecte : « ce mouvement existe déjà en Amérique du Sud, au Canada, en Espagne ». A la croisée des chemins entre ses compétences professionnelles, son appétence pour la vie associative et culturelle locale et son implication d’ancienne élue, elle voulait un projet « pour mettre en valeur l’humanité de chacun, car dans mon métier d’architecte, remettre en état des vieilles pierres manquait de vivant. Mon expérience de bénévole dans les associations avec des projets participatifs, de conseillère municipale, m’ont appris à comprendre mon territoire, mon bassin de vie et m’ont donné l’envie d’en être actrice ». La jeune porteuse de projet, « femme du 21e siècle » était aussi coordinatrice du réseau Femmes de Bretagne à Combourg. « J’ai fait de belles rencontres sur mon territoire, mais je me suis rendu compte que la plupart des femmes portent des petits projets qui durent six mois, un an, le temps des allocations chômage. Ça m’a attristée. Mon ambition en sortant du confort du salariat, c’était de voir grand ! Un projet qui sortait de mes tripes et en accord avec ma formation ». Budget prévisonnel 370000 €, quatre salariés et deux saisonniers.
Déconstruire les schémas du salariat. Sur le chemin de Delphine pour concrétiser son musée, Sophie Bethencourt, la créatrice de la formation CREOPSS à Dinan. « J’ai commencé le cursus en 2019. C’est indispensable. Quand on envisage de devenir cheffe d’entreprise il faut déconstruire les schémas du salariat. Cela m’a beaucoup aidée, dans ma réflexion sur le projet, sur ma posture d’entrepreneure et mon rapport à l’argent. En décortiquant le budget ligne par ligne, mois par mois, cela a permis de crever le plafond de verre lié à mon ancien statut de salarié. Mon entreprise c’est un projet avec un impact social. On regarde les chiffres autrement ». Le confinement a été l’opportunité de clarifier et d’organiser encore plus son musée, le « rendre lisible ». Cet automne, elle intègre le TAg22, le propulseur d’entrepreneuriat collectif des Côtes d’Armor. « Je me suis fixé une échéance à six mois pour matérialiser mon projet. Asseoir d’abord une communication pour fédérer les potentiels partenaires, trouver deux associés.e.s et constituer une SCIC (société coopérative d’intérêt collectif) dynamisant le tourisme culturel local. Un statut qui permet de gagner en communauté et en visibilité. Vaut mieux une voie lactée que des étoiles éparpillées ! ».
En intégrant son EMII au tourisme vert, rural et culturel elle souhaite « offrir une nouvelle manière de consommer la culture, créer des passerelles entre les humains et notre territoire, qu’ils ressortent sensibilisés parce que quelque chose a résonné en eux. Un projet avec du bon sens et certainement pas un lieu de silence !». Ouverture prévue en 2022.
Contact : delphine@joiedevivreici.com
06 78 35 30 30 - www.joiedevivreici.com
Patrice Hénaff, directeur de Rich’ESS
"Saisir des besoins, s’adapter à de nouvelles réalités, c’est innover".
«Aujourd’hui, de nombreuses démarches artistiques placent le citoyen au coeur du processus de création. En proposant une co-construction artistique et une nouvelle façon de cotoyer les oeuvres, la vie culturelle met le visiteur dans un rapport d’acteur et non plus de consommateur. La culture devient un espace d’innovation sociale. Comme dans le projet de Delphine. Elle a su identifier et saisir des besoins, s’adapter aux nouvelles réalités du monde culturel pour inscrir son projet dans les nouveaux enjeux de la société, contribuer à la production de savoirs et à la dynamique de son territoire».
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